«Carlez-moi» d’amour

Marc-André Morel
Le Magazine le 22 octobre 2010

C’est connu, on ne va pas au restaurant pour manger. On peut le faire chez soi. Ce qui nous attire c’est le fait de se faire servir, l’atmosphère, des mets qu’on ne peut ou ne veut pas préparer soi-même et ainsi de suite. Mais pourquoi retourne-t-on aux mêmes endroits? Proximité? Budget? La spécialité? C’est branché?

Ce qui fait le succès durable de tous les établissements - restaurants ou autres – c’est… l’amour. Ben oui ! Comme avec la «sauce à spaghetti» de notre grand-mère. Vous avez sûrement déjà été témoin d’un restaurant qui a connu beaucoup de succès pendant de longues années et, dix-huit mois après qu’il ait été vendu, il a fermé ses portes à cause de la chute dramatique de l’achalandage. Ni le décor, ni le menu n’avaient changé. Ce n’était tout simplement plus le même endroit.

Dans le quartier où je vis, il y a ce resto: Chez Carl. Une pizzeria au four à bois. Un endroit caché derrière les arbres et les arbustes de l’immeuble commercial qui l’abrite. Tout comme son bâtiment, le décor est sobre. J’adore la pizza, mais ce n’est pas pour ça que j’y retourne. Des pizzas, il s’en fait partout, n’est-ce pas? J’y retourne pour son énergie. L’énergie que dégage son jeune et solide propriétaire, mâle alpha génération X, entouré d’un staff féminin tout aussi allumé qu’attentionné, compétent que séduisant, réactif que discret. Vous n’avez qu’à avoir le privilège d’être servi par Marie-Claude, la jeune doyenne surdouée pour le service à peine une seule fois et vous serez conquis. Et toutes ces touches personnelles des Valérie, Myriam et Mélanie, qui, sans contredit, aiment ce qu’elles font et pour qui elles le font, feront en sorte que la clientèle reviendra encore, et encore.

C’est ce qui me retient depuis 28 ans chez mon expert en assurances, 11 ans chez mon nettoyeur grâce à Gigi, Guylaine, les deux Roxane, Catie, Julie, Fernande, Vanessa, Marc-André et les autres. Je souhaite que ce soit Pierrette qui soit au comptoir de Postes Canada quand j’y vais, que ce soit le livreur russe qui ne parle ni français ni anglais et dont je ne connais pas le nom quand on me livre ma pizza, Pierre quand je vais au club vidéo, Marie chez le vet, Benjamin au gym, Carmen, Patricia, Kendra et Sylvie Chez Cora. Je ne me sens même pas dans une banque quand je vais à ma succursale et que je suis accueilli par Manon, Vincent, Lilia, Daniel ou Maia. Ces gens ont ce dénominateur commun: de l’amour dans ce qu’ils font et pour qui ils le font.

Le mépris, la condescendance, l’indifférence et les états d’âme douteux sont les toniques parfaits pour faire fuir la clientèle. Et comme il y a deux côtés à une médaille, mieux vaut apprendre à aimer ce que l’on fait et pour qui on le fait. Je vous en prie, Carlez-moi d’amour !

M. J. Combdon

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