Amir Khadir et Françoise David : du compromis avec l’intégrisme religieux au mépris envers le mouvement émancipateur des Janette

Collectif du Rassemblement pour la laïcité


Le Rassemblement pour la laïcité s’insurge contre les opinions récemment exprimées par plusieurs journalistes et Amir Khadir, député de Québec solidaire, au sujet des Janette. Un grand mythe est actuellement façonné pour discréditer l’aspiration à la laïcité d’une large proportion du peuple québécois. Le puissant mouvement en cours en faveur de la laïcité ne serait, selon les dires de certains, que la résultante d’un plan orchestré entre Julie Snyder, l’empire Québecor et le gouvernement du Parti québécois . À en croire Amir Khadir et Québec solidaire, les Québécois seraient entraînés sur une trajectoire ne servant qu’à détourner le bon peuple des questions dites plus fondamentales comme les inégalités économiques, la pauvreté et la lutte contre le néolibéralisme.

Une question démocratique

Le Rassemblement pour la laïcité tient à dénoncer une telle vision des choses. Discréditer le mouvement des Janette, c’est s’en prendre directement à une aspiration fondamentale soutenue par une large proportion de Québécois. Le débat sur la laïcité, en tant que question démocratique, est une problématique fondamentale qui interroge les fondements de l’État et l’organisation des rapports sociaux dans la société. Elle n’est pas non plus séparable des questions sociales, comme la problématique des droits des femmes, en plus d’être une bataille contre l’obscurantisme. Depuis le Siècle des Lumières, la nécessaire séparation de l’Église et de l’État a toujours été une des plus grandes préoccupations des démocrates et des gens progressistes dans le monde. Au Québec, le mouvement actuel s’inspire d’ailleurs de tous les autres combats pour la laïcité menés par les Québécois depuis les années 1960. Et il est très fort ! Aujourd’hui, la pétition du Rassemblement pour la laïcité recueille plus de 45 000 signatures ! Des gens de tous horizons l’ont signée, dont un grand nombre de personnalités et d’artistes. Si la question de la laïcité n’était pas une question fondamentale dans la société, les Québécois n’auraient pas perdu de temps avec cela depuis 50 ans. Il faut savoir que les batailles pour la laïcité ont été parmi les toutes premières à prendre leur essor au début des années 1960. La question de la laïcité doit être comprise avec la fondamentale exigence du respect de la liberté de conscience des individus qu’aucun intégrisme ne saurait respecter.

Quoi qu’on en dise, le geste posé par le gouvernement est historique sur la voie de la séparation de l’Église et de l’État. Le gouvernement a soumis certaines propositions controversées, comme le maintien du crucifix à l’Assemblée nationale ou la reconnaissance éventuelle d’un droit de retrait. Mais le débat suit son cours et des amendements au projet initial seront possiblement apportés. Pendant ce temps, les partisans de la laïcité ouverte aux accommodements religieux, dite inclusive sans réellement l’être, sont les alliés objectifs du communautarisme, de l’obscurantisme et du maintien de la ségrégation sexuelle envers les femmes. Ce faisant, ils servent de vecteur pour les mouvements fondamentalistes alors que, sur la question du port des signes religieux, l’interdiction pour les agents publics de l’État est la seule position démocratique et progressiste possible.

Le Rassemblement pour la laïcité est porteur de cette aspiration à séparer l’Église et l’État. Il n’est nullement “instrumentalisé” par qui que ce soit. Si le gouvernement a présenté un projet de charte, c’est parce qu’il a bien vu l’aspiration à la laïcité d’un grand nombre de Québécois et Québécoises. Cette aspiration à une réelle laïcité est celle qui a été la plus exprimée lors des témoignages recueillis par la Commission Bouchard-Taylor, même si elle a malheureusement été rejetée par ses deux commissaires.

Pourquoi interdire les signes religieux ?

La question centrale dans le débat actuel, c’est celle de la sécularisation de tout le personnel des institutions publiques. Dans les écoles du Québec des années 1950 et 1960, les coiffes des soeurs catholiques ainsi que les soutanes des frères ou des Jésuites renvoyaient toujours aux yeux des étudiants les messages obscurantistes de l’Église catholique : l’obligation de la prière, l’abstinence sexuelle, l’interdiction des relations sexuelles avant le mariage, la condamnation de l’homosexualité, le rejet de la modernité. À force de batailles et de revendications, le Québec s’est heureusement débarrassé de tout cela et a forcé la sécularisation du personnel enseignant. Au chapitre des signes ostentatoires catholiques, il n’y en a plus à l’école, heureusement. Il ne reste que le crucifix à l’Assemblée nationale.

Cependant, certains signes associés à d’autres religions, dans un contexte de montée de l’intégrisme, ravivent maintenant de mauvais souvenirs aux Québécois. Par exemple, comment ne pas percevoir le port du turban comme une position potentiellement hostile envers l’homosexualité ? L’Église sikhe s’oppose à l’homosexualité. En 2005, elle a fait campagne contre la reconnaissance du mariage gai au Canada. On pourrait comprendre, dans un cas d’espèce, qu’un étudiant homosexuel non pratiquant puisse se sentir lésé ou tout simplement vexé dans une classe où un enseignant porte le turban. L’Église sikhe, comme le Vatican, est également opposée au droit à l’avortement et aux relations sexuelles avant le mariage. Dans les régimes islamiques, l’homosexualité est tout autant condamnée. Les gais et lesbiennes sont le plus souvent ostracisés, pourchassés et parfois même assassinés.

Le foulard de l’intégrisme

Pour sa part, le foulard islamique demeure un symbole de ségrégation sexuelle et de soumission à l’homme, comme le drame de plusieurs familles au Canada l’a si violemment démontré. Peut-on vraiment rester dans l’inconscience devant un tel retour en arrière suggéré par ce symbole ? Par les positions qu’ils soutiennent sur cette question, par aveuglement ou autre motivation, Amir Khadir et Françoise David sont les alliés objectifs des islamistes intégristes. En effet, lors de la conférence de Tariq Ramadan tenue le 3 septembre 2012 au Palais des congrès, la veille de l’élection générale au Québec, le Forum musulman canadien a distribué un classement des candidats en lice dans la région métropolitaine sous forme d’un bulletin électoral . Il accordait aux candidats de QS les plus hautes cotes (A pour Françoise David et B+ pour Amir Khadir) et octroyait une décote (la cote D) pour presque tous les candidats du Parti Québécois et ceux qui se déclaraient partisans de la laïcité, dont Fatima Houda-Pépin, candidate libérale reconnue pour ses prises de position contre les fondamentalistes et les tribunaux de la charia. Il ne faut donc pas s’étonner de voir M. Khadir fréquenter le banquet annuel du Forum musulman canadien à l’automne 2012. L’orchestration des alliances ne se fait peut-être pas là où le dénonce à hauts cris Amir Khadir.

La thèse de l’orchestration de la campagne des Janette par l’empire Québecor et le gouvernement Marois est une insulte à l’intelligence, aux femmes du Québec et au peuple québécois qui sait pertinemment ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas. Tous les Québécois, de toutes origines, sont capables de réfléchir par eux-mêmes. Ils sont d’ailleurs en voie de franchir un pas historique sur la voie de la laïcité.

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