Tout, tout de suite, et tout cuit dans le bec

«J’ai l’impression que si certains étudiants pouvaient acheter leur diplôme et le recevoir par la poste
sans avoir à se pointer à l’université ni à faire le moindre travail, ils le feraient, m’a-t-il dit.
L’important pour eux n’est pas d’apprendre, c’est d’avoir leur diplôme…

«Idem pour le marché du travail. Ils sortent de l’école et veulent déjà être patrons!
Ils ne se rendent pas compte que les gens qui ont des postes de direction
ont bossé pendant 25 ans pour se rendre à ce niveau! Ils ont sué, ils ont travaillé fort…

«Eux veulent tout, tout de suite, et tout cuit dans le bec.»

 

La révolution Gregory (2)

CA_RichardMartineau

RICHARD MARTINEAU

JOURNAL DE MONTRÉAL, PUBLIÉ LE: SAMEDI 08 JUIN 2013

L’autre jour, je vous parlais de Gregory Charles, à quel point il est stimulant, fonceur, une vraie dose de vitamine C…

Ce gars-là ne s’assoit jamais sur ses lauriers, il est toujours en train de pousser la machine.

Il est super exigeant envers lui, il a le sens de l’effort, il croit en ses capacités, il a de l’ambition, il voit gros – des qualités que nous aurions intérêt à développer, tant individuellement que collectivement.

GRAND THEFT AUTO 3

Gregory m’a raconté une histoire que je trouve parfaitement représentative de notre époque.

Comme vous le savez, ce chanteur-musicien-homme d’affaires adore enseigner.

Un jour, il a remarqué que ses élèves ne cessaient de parler de Grand Theft Auto 3, le fameux jeu vidéo qui s’est vendu à des gonzillions d’exemplaires. Il s’est demandé pourquoi ces jeunes tripaient autant sur ce jeu controversé.

Alors, en perfectionniste qu’il est, il s’est mis à lire tout ce qui a été publié sur le sujet. Il est passé à travers le manuel d’utilisation du jeu, une bible qui a l’épaisseur d’un annuaire téléphonique.

À la fin de sa lecture, il savait tout ce qu’il y a à savoir sur Grand Theft Auto 3. Quand je dis tout, c’est tout.

LE TRICHEUR

Prêt à passer à l’action, Gregory Charles s’est précipité en ville pour acheter le fameux jeu. Puis il s’est planté devant sa télé et a sorti ses manettes…

Après avoir passé une demi-heure à rouler à toute vitesse dans les rues virtuelles de Liberty City, Gregory s’est aperçu qu’un autre joueur avait terminé le jeu en… 14 minutes.

«Quatorze minutes? s’est-il exclamé. Mais c’est impossible, comment a-t-il fait?»

Après avoir effectué des recherches, il s’est rendu compte que le joueur en question ne complétait pas les différents niveaux du jeu.

Il ne faisait qu’utiliser des codes pour passer automatiquement d’un niveau à l’autre.

Clic-clic, niveau 2. Clic-clic, niveau 3.

Le gars ne jouait pas à Grand Theft Auto 3. Il trichait pour se rendre à la fin le plus rapidement possible.

TOUT CUIT DANS LE BEC

Pour Gregory, c’est une métaphore de ce qui se passe actuellement.

Les gens, dit-il, ont perdu le sens de l’effort, ils cherchent toujours des raccourcis, des solutions de facilité pour se rendre là où ils veulent aller…

«J’ai l’impression que si certains étudiants pouvaient acheter leur diplôme et le recevoir par la poste sans avoir à se pointer à l’université ni à faire le moindre travail, ils le feraient, m’a-t-il dit. L’important pour eux n’est pas d’apprendre, c’est d’avoir leur diplôme…

«Idem pour le marché du travail. Ils sortent de l’école et veulent déjà être patrons! Ils ne se rendent pas compte que les gens qui ont des postes de direction ont bossé pendant 25 ans pour se rendre à ce niveau! Ils ont sué, ils ont travaillé fort…

«Eux veulent tout, tout de suite, et tout cuit dans le bec.»

PATIENCE

Pour Gregory, le temps est venu pour notre société de réapprendre le sens de l’effort. Et la notion de patience.

Comme dit le proverbe: «Tout vient à point à qui sait attendre.»

Et qui n’a pas peur du travail.